Le vice-gouverneur de la Banque centrale de la République de Guinée (BCRG) figure sur la liste des 25 personnalités du régime Alpha Condé, accusées de faire ‘’preuve de zèle pour supprimer l’opposition et violer les droits de l’homme’’. Baidy Aribot, interrogé lundi par VisionGuinee, assure qu’il ne se reproche de rien et dénonce la démarche des auteurs de cette liste. Entretien.
VisionGuinee : Ancien député de Kaloum, vous vous êtes effacé de la scène politique depuis votre arrivée à la Banque centrale. Existe-t-il une raison pour justifier ce retrait ? 

Baidy Aribot : C’est tout à fait normal. Je travaille beaucoup. Je suis très occupé au quotidien par les activités au niveau de la Banque centrale. Je consacre l’essentiel de mon temps les weekends à des travaux champêtres. Je produis du riz et du manioc dans la préfecture de Boffa. Je n’ai pas assez de temps pour parler de politique ou rentrer dans des débats inutiles.

Votre nom figure parmi les 25 personnalités du régime d’Alpha Condé ciblées par des sanctions de l’Union européenne à la demande d’un groupe de 32 eurodéputés. Comment réagissez-vous à la publication de cette liste ?

Qui a établi cette liste ? Le FNDC ? C’est quoi le FNDC même ? Leur débat sur le troisième mandat est un vieux débat. Nous, on a dépassé ce stade.

Certes, mais le mouvement continue d’exister…

Ce machin qu’on appelle FNDC existe encore ? Pour moi, il est mort.

Si le FNDC était mort, pensez-vous que des députés de l’UE allaient s’intéresser à une liste que cette entité a élaborée ?

Arrêtons un peu. Pour moi, le FNDC n’existe pas. C’est un gros machin qui a fait son temps sur Facebook alors qu’il n’existe pas du tout sur le terrain. Si on parlait des partis politiques de l’opposition, je peux comprendre. C’est pourquoi, je dis que la publication de cette liste est bizarre et ridicule. Des gens s’asseyent entre quatre murs, rédigent des noms et envoient à des institutions sans même savoir ce que peut donner comme image à leur pays. Pour moi, ceux qui ont font cela ne sont pas des guinéens. Quand on aime son pays, on évite que d’autres remettent en cause notre souveraineté. Ils pensent qu’ils font du mal à nous qui sommes aujourd’hui vus par eux comme étant de mauvais guinéens. Mais ils se trompent. Ils sabordent la souveraineté du pays par leurs actes.

Concrètement, pourquoi la publication de cette liste dérange ?

Personnellement, ça ne me dérange pas du tout. D’ailleurs, j’ai beaucoup aimé la réaction du ministre Tibou Kamara, porte-parole du gouvernement. J’ai aussi fait une sortie sur Facebook pour rappeler que la Guinée n’est pas un pays membre de l’Union européenne et qu’on n’a pas d’injonctions à recevoir de cette institution. Certains pensent que c’est une déclaration populiste ou souverainiste que j’ai faite. Peu importe. Ce que je sais, c’est que je suis jaloux de la souveraineté de mon pays. Mettre sur une liste le Premier ministre, le président de l’Assemblée nationale, des représentants d’institutions et envoyer à l’étranger, pour moi, c’est inconcevable. Au-delà de leurs personnes, ils représentent une parcelle de souveraineté institutionnelle de notre pays.

En attendant, des menaces de sanctions planent sur vos têtes…

Pour moi, c’est un non-évènement. Qu’est-ce que j’ai fait de mal ? Le fait de dire que je suis partisan de la stabilité et non pour une alternance incontrôlée, est-ce un crime ? Pour avoir soutenu des réformes constitutionnelles et donner la possibilité au président Alpha Condé de matérialiser cet effet de fait avec un mandat de plus, est-ce un crime ? Pas du tout. Pour moi, c’est un débat d’idées et politique. Cela ne méritait pas tout ce qu’on a vu ici. Certains ont plongé le pays dans une violence extrême, déraillé le train, détruit des lampadaires, barricadé des routes. D’autres ont mis des grenades dans des véhicules pour aller faire sauter des stations d’essence. Ce sont les mêmes qui vont ailleurs pour se plaindre contre ceux qui pensent que la Guinée doit être stable, continuer à aller de l’avant.

Vous vous réclamez souverainiste, mais votre famille vit en France. N’est-ce pas contradictoire ?

Ça n’a pas de sens. Je n’ai pas tous les membres de la famille à l’étranger. Ma femme vit en Guinée. Certains de mes enfants vivent ici. J’ai une maison en France, c’est vrai, mais je ne l’ai pas acquise quand j’étais avec le pouvoir. Quand j’étais membre de l’opposition, certains opposants venaient dans cette maison pour parler de politique avec moi. Ce sont les mêmes qui changent de discours aujourd’hui parce que je suis dans le camp présidentiel. C’est lâche.

Il faut aussi que les gens fassent la différence entre ce que je fais et la vie de ma famille. Mes enfants qui sont majeurs, ont le droit de vivre où ils veulent. Ce n’est pas à moi de décider à leur place. Je crois que c’est l’opposition qui tient des discours populistes avec des comparaisons insensées. Suis-je le seul guinéen qui a sa famille à l’étranger ? Ma famille vit en France avant même que je ne me lance dans la politique. Ces opposants ne se battent pas la démocratie en Guinée. Ils ne veulent pas faire avancer des choses. Tout le combat qu’ils mènent est dirigé contre des personnes pour des raisons subjectives de jalousie.

Je vais vous citer une anecdote. Quand des gens sont venus manifester chez moi en France et agresser ma famille, mon fils de 8 ans qui vit avec sa tante là-bas, m’a appelé pour me demander qui sont-ils. Je lui ai dit que c’est tout simplement des sans-papiers. Il m’a répondu qu’on va demander à la mairie de les aider. Ce qui prouve que c’est ridicule d’aller manifester là-bas alors que je suis à Conakry. Comment de telles actions peuvent-elles apporter un changement pour eux en Guinée ? C’est juste des plaisanteries pour amuser la galerie. Cela ne m’a pas amené à les poursuivre en justice en France qu’ils considèrent comme un pays de droit et de démocratie. Ce sont les mêmes qui nous accusent de violer les droits de l’homme en Guinée, c’est insensé.

Reconnaissez-vous au moins qu’il y a eu des cas de violations des droits de l’homme en Guinée ?

S’il y en a, ce n’est pas à moi de les constater. Il y a des institutions qui sont chargées d’établir ces faits et indiquées ceux qui en sont responsables. Nous, on ne nous a pas vus agresser quelqu’un. Nous étions sur le terrain de manière civilisée pour convaincre les citoyens de permettre aux institutions républicaines d’évoluer vers plus de stabilité et renforcement de nos acquis démocratiques et que le président Alpha Condé est l’alternative la plus crédible. Nous n’avons pas tenu des discours de haine contre nos adversaires politiques. Personne ne m’a vu tenir même des propos discourtois contre un opposant.

Le débat aujourd’hui, c’est entre les acteurs politiques qui sont les leaders de partis de la mouvance et de l’opposition. Comment un groupuscule de gens agités peut-il se permettre à chaque fois de remettre en cause l’ordre établi en trainant la patrie dans la semelle de leurs chaussures ? Ils mènent des débats de caniveaux. Moi j’ai autres choses à faire que de m’occuper de leur désidérata. Je suis bien en parfait amour et de respect avec mes concitoyens qui vivent ici. Je n’ai rien sur ma conscience. Je mène mon combat de manière positive.

Et c’est quoi ce combat ?

Mon combat, c’est d’aider la Guinée et les guinéens à avancer vers des préoccupations majeures qui ont des incidences positives sur leurs vies au quotidien, pas de rester dans les perpétuelles chicaneries politiques. Après tout, c’est ici qu’on compte finir nos vies, pas ailleurs.

Un dernier mot ?

J’appelle les acteurs politiques à rejoindre la table de négociations. Le président de la République a pris une décision forte en nommant un opposant en la personne de Fodé Bangoura dans les fonctions de secrétaire permanent du cadre de dialogue politique et social. C’est un homme expérimenté qui connait les rouages de la politique guinéenne et qui peut mener à bien les objectifs qui lui sont assignés. De toutes les façons, il faut qu’on arrive à sortir de cette situation pour le bien de la population guinéenne.

 

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